Contrats d’Objectifs, de Moyens et de Performance (COMP) : définition et enjeux pour les établissements d’enseignement supérieur

Comp

Vous êtes responsable d’un établissement d’enseignement supérieur et vous vous interrogez sur les nouvelles modalités de financement proposées par l’État ? Les Contrats d’Objectifs, de Moyens et de Performance (COMP) transforment actuellement le paysage du financement universitaire français. Mis en place depuis 2023, ces contrats instaurent un nouveau paradigme dans la relation entre le ministère et les établissements, en conditionnant l’allocation de ressources à l’atteinte d’objectifs mesurables. Cette évolution majeure marque une rupture avec les précédents modèles de financement, introduisant une logique de performance et de responsabilisation inédite dans l’enseignement supérieur français.

Qu’est-ce que les accords COMP dans l’enseignement supérieur ?

Les Contrats d’Objectifs, de Moyens et de Performance constituent un nouveau type d’accord contractuel entre le ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche et les établissements. Ils remplacent progressivement le Dialogue Stratégique de Gestion (DSG) qui prévalait jusqu’alors, avec une approche plus structurée et orientée vers les résultats. Annoncés par le Président de la République le 13 janvier 2022, lors du 50ème anniversaire du congrès de la Conférence des présidents d’universités, ces contrats visent à « resserrer les liens entre les objectifs contractuels, les moyens alloués et la performance des établissements ».

D’une durée de trois ans, les COMP se déploient selon un calendrier en trois vagues successives initiées en 2023. La première vague a concerné 34 établissements pilotes (18 universités, 13 écoles et 3 instituts), représentant 34% de la subvention pour charge de service public annuelle des établissements d’enseignement supérieur. Au total, 140 établissements (76 universités, 62 écoles ou instituts et 2 centres universitaires) sont éligibles à ce dispositif. Contrairement aux contrats quinquennaux plus volumineux, les COMP se veulent plus courts (une quinzaine de pages), plus rapides à élaborer (6 mois) et plus opérationnels.

Les six axes stratégiques au cœur de la contractualisation

Les COMP s’articulent autour de six objectifs stratégiques, dont cinq sont définis par le ministère et un est propre à chaque établissement. Cette structure permet d’aligner les priorités nationales avec les spécificités locales. Chaque axe doit se traduire par des actions concrètes, limitées en nombre (généralement deux ou trois par objectif) mais ambitieuses dans leur portée transformatrice.

  • Formation aux métiers d’avenir et en tension : développement de nouvelles filières répondant aux besoins du marché du travail, transformation des formations existantes pour intégrer les compétences émergentes, renforcement des liens avec le monde professionnel.
  • Bien-être et réussite étudiante : mise en place de dispositifs d’accompagnement personnalisé, amélioration des services de santé mentale, développement d’infrastructures favorisant l’inclusion et la diversité.
  • Excellence en recherche et innovation : consolidation des partenariats stratégiques nationaux et internationaux, augmentation de la participation aux appels à projets européens, renforcement des liens avec le secteur privé pour valoriser la recherche.
  • Transition écologique et développement soutenable : intégration systématique des enjeux environnementaux dans les formations, réduction de l’empreinte carbone des campus, sensibilisation des étudiants et du personnel aux défis écologiques.
  • Amélioration de la gestion et du pilotage : optimisation des ressources humaines et financières, modernisation des systèmes d’information, valorisation du patrimoine immobilier.
  • Objectif « signature » : axe spécifique reflétant l’identité et les priorités propres à chaque établissement, permettant de valoriser ses atouts distinctifs.
Lire :  Qu'est-ce qu'un OPCA et quel est son rôle dans la formation professionnelle en France ?

Mécanismes de financement et conditionnalité des versements

Le financement des COMP repose sur une enveloppe annuelle d’environ 100 à 120 millions d’euros, représentant entre 0,8% et 1% de la subvention pour charge de service public totale des établissements concernés (13,5 milliards d’euros). Pour un établissement dont la subvention se monte à 300 millions d’euros, cela peut représenter entre 7 et 9 millions d’euros supplémentaires sur trois ans, un montant non négligeable qui vient s’ajouter aux financements récurrents.

La particularité des COMP réside dans leur mécanisme de versement conditionnel. Les fonds sont généralement débloqués selon un calendrier progressif : 50% en avance la première année, 30% en complément la deuxième année, et 20% en solde la troisième année. L’originalité du dispositif tient au fait que le versement effectif des crédits est conditionné à l’atteinte des objectifs définis et des cibles associées aux indicateurs de performance. En cas d’atteinte partielle d’une cible, le montant des crédits est ajusté au prorata du niveau de réalisation effective, ce qui peut se traduire par un ajustement du solde ou un abattement sur le premier versement du COMP suivant.

Processus d’élaboration et de suivi des conventions

L’élaboration d’un COMP suit un processus structuré qui commence par une phase de dialogue entre l’établissement et le rectorat. Cette première étape permet d’identifier les axes stratégiques prioritaires et les actions envisagées pour les mettre en œuvre. Vient ensuite une phase de négociation avec le ministère pour affiner les objectifs, définir les indicateurs de performance et déterminer les moyens financiers associés.

La construction du COMP nécessite une réflexion approfondie sur la cohérence entre les actions proposées et la stratégie globale de l’établissement. Le document doit mettre en évidence les liens avec le contrat quinquennal existant, les recommandations du Haut Conseil de l’Évaluation de la Recherche et de l’Enseignement Supérieur (HCERES) et les projets déjà financés dans le cadre du Programme d’Investissements d’Avenir (PIA) ou de France 2030.

Lire :  Qu'est-ce que Constructys OPCO et quelles sont ses missions dans le secteur de la construction ?

Le suivi des COMP s’effectue sur une base annuelle, avec un dialogue permettant de partager l’avancement des actions et, si nécessaire, d’ajuster les ambitions et les financements. À la fin de la période contractuelle, un bilan précis est réalisé sur l’ensemble du COMP et sur chacune des actions, servant de base au calcul du solde financier et à la préparation du contrat suivant.

Indicateurs de performance : clés de voûte du dispositif

Les indicateurs de performance constituent l’élément central du dispositif COMP, puisqu’ils déterminent directement le niveau de financement accordé. Chaque action inscrite dans le contrat doit être associée à un ou plusieurs indicateurs mesurables, qui ne doivent pas se limiter à constater la réalisation de l’action mais évaluer son impact réel.

La Cour des comptes, dans son rapport de mars 2025, a souligné l’importance d’introduire un socle limité d’indicateurs communs à l’échelle nationale, notamment dans le champ des politiques publiques prioritaires. Cette recommandation vise à inscrire la performance dans une démarche nationale cohérente et à limiter le foisonnement actuel des indicateurs, qui varie considérablement d’un établissement à l’autre.

AspectAncien modèle (DSG)Nouveau modèle (COMP)
DuréeAnnuelPluriannuel (3 ans)
ConditionnalitéFaible ou inexistanteForte, liée aux résultats
IndicateursPeu nombreux, souvent de moyensMultiples, orientés résultats
Volume financierLimitéSubstantiel (0,8 à 1% de la SCSP)
SuiviPeu formaliséStructuré et régulier

Avantages et défis pour les établissements universitaires

Les COMP offrent plusieurs avantages significatifs pour les établissements d’enseignement supérieur. Ils apportent une visibilité pluriannuelle sur une partie des financements, permettant une planification stratégique plus efficace. Ils renforcent l’autonomie des établissements en leur donnant la possibilité de définir leurs propres priorités dans le cadre des objectifs nationaux. Ils encouragent une culture de la performance et de l’évaluation, favorisant l’amélioration continue des pratiques.

Lire :  ISO 26000 : qu’est-ce que c’est et pourquoi elle devient incontournable ?

Toutefois, ces contrats présentent des défis non négligeables. Leur périmètre reste relativement restreint (moins de 1% du budget total), limitant leur impact transformationnel. La complexité administrative liée à leur élaboration et à leur suivi peut représenter une charge supplémentaire pour les équipes de direction. La capacité à projeter une trajectoire financière soutenable au-delà des trois ans du contrat constitue un enjeu majeur, les actions engagées devant souvent être pérennisées après la fin du financement COMP. Enfin, la diversité des établissements (taille, spécialisation, ressources) peut créer des inégalités dans la capacité à tirer pleinement parti de ce dispositif.

Vers une fusion avec les contrats pluriannuels d’établissement

L’avenir des COMP semble s’orienter vers une intégration plus poussée avec les autres dispositifs contractuels existants. La Cour des comptes a recommandé, dans son rapport de mars 2025, de fusionner à compter de 2026 les COMP avec les contrats pluriannuels d’établissement. Cette fusion permettrait d’instaurer un temps de dialogue unifié sur les objectifs, les moyens, la performance et l’évaluation, simplifiant ainsi le paysage contractuel et renforçant la cohérence des politiques publiques.

Cette évolution s’inscrit dans une tendance plus large de rationalisation des relations entre l’État et les établissements d’enseignement supérieur. Elle vise à étendre la démarche de performance à l’ensemble des missions des établissements, au-delà des six axes prioritaires actuellement définis dans les COMP. La ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche a d’ailleurs indiqué que les calendriers des COMP et des contrats quinquennaux seraient progressivement harmonisés, avec des ajustements de durée pour assurer leur cohérence.

Les COMP représentent une évolution majeure dans le financement de l’enseignement supérieur français, introduisant une logique de performance et de responsabilisation sans précédent. Si leur impact financier reste limité en proportion du budget total des établissements, leur influence sur les pratiques de gouvernance et de pilotage pourrait être considérable à long terme. La fusion annoncée avec les contrats pluriannuels d’établissement à partir de 2026 marque une nouvelle étape dans cette transformation, vers un modèle plus intégré et cohérent. Nous vous invitons à suivre avec attention l’évolution de ce dispositif, qui continuera de façonner le paysage universitaire français dans les années à venir.

Partager :

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *